Le fabricant allemand de vélos électriques haut de gamme gèle temporairement ses livraisons vers le marché américain. En cause : l’instauration de droits de douane pouvant atteindre 50 % sur certains composants en acier, conséquence directe de la politique commerciale de l’administration Trump.
Depuis plusieurs mois, l’industrie du vélo électrique évolue dans un contexte marqué par des tensions commerciales croissantes entre les États-Unis, l’Europe et l’Asie. Après les hausses tarifaires sur les importations asiatiques, les annonces américaines sur l’acier ajoutent une nouvelle couche d’incertitude pour les marques européennes.
Riese & Müller, spécialiste des vélos électriques premium urbains et cargos, a informé ses revendeurs américains qu’il suspendait toute expédition vers les États-Unis, le temps d’évaluer les conséquences de ces nouvelles mesures.
« Nous avons besoin de quelques jours afin d’analyser rigoureusement la situation et ses conséquences avant de procéder aux prochaines étapes », explique la marque dans un email cité par
Bicycle Retailer.
La décision de Riese & Müller peut surprendre : la plupart de ses modèles utilisent des cadres en aluminium et parfois en carbone, et non en acier. En théorie, l’impact direct des nouvelles taxes devrait donc être limité. Mais la réalité est plus complexe. Comme le souligne Electrek, les contrôles douaniers reposent sur des codes tarifaires flous et appliqués de manière inégale. Un vélo peut se voir taxé sur la totalité de sa valeur si la proportion d’acier n’est pas correctement documentée.
Pour un fabricant premium, le risque d’un surcoût imprévisible ou de blocages administratifs à la frontière devient trop important. Riese & Müller préfère donc sécuriser ses marges et préserver ses stocks plutôt que de s’exposer à des pénalités difficiles à anticiper.
L’impact direct sur le marché américain sera probablement limité : Riese & Müller y occupe une place de niche. Mais la portée symbolique est forte. Si même un fabricant premium choisit de geler ses livraisons, d’autres pourraient suivre.
Cette décision intervient alors que l’ensemble de l’industrie est sous pression. La montée des droits de douane sur les vélos et composants chinois a déjà redessiné les flux d’importation et fragilisé de nombreux acteurs. Certaines marques, comme BMC, ont dû réduire leurs effectifs pour faire face à ces incertitudes, tandis que d’autres, comme Rotor, ont fermé des filiales entières sur le marché nord-américain.
Cette suspension illustre les limites d’un marché mondialisé exposé à des règles commerciales changeantes. Les tensions autour des tarifs douaniers sur l’acier s’ajoutent à une longue série de mesures, allant des surtaxes imposées à la Chine aux contre-mesures européennes.
Comme l’expliquait récemment Bosch eBike Systems dans notre analyse dédiée à l’accord commercial US-UE, l’enjeu ne se limite pas aux seuls tarifs : c’est la visibilité réglementaire qui manque aujourd’hui aux acteurs. Sans prévisibilité, difficile d’investir, d’innover ou de planifier la production.
Sur Cleanrider, nous avons déjà détaillé les conséquences de ces tensions dans notre décryptage sur les droits de douane américains et leurs impacts sur les importateurs européens et dans notre article consacré à la fermeture de Rotor face à la guerre commerciale. La décision de Riese & Müller s’inscrit dans cette dynamique inquiétante : un secteur qui vacille sous la pression d’une politique commerciale imprévisible.
Pour l’heure, Riese & Müller demande à ses distributeurs américains de suspendre toute nouvelle commande et de se concentrer sur l’écoulement des stocks déjà livrés. La reprise des exportations dépendra des arbitrages politiques à venir et de l’évolution des règles douanières. Mais une chose est claire : les tensions actuelles autour des droits de douane sur l’acier pourraient marquer le début d’une nouvelle phase d’instabilité pour les marques européennes de vélos électriques.
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