Alors qu’elle se voulait pionnière du vélo électrique connecté, la marque belge Cowboy traverse une crise majeure en 2025. Finances précaires, cadres défectueux, clients furieux, partenaires qui se retirent : l’enquête du journal De Tijd dresse un tableau préoccupant.
Dans une enquête publiée le 5 août, le quotidien belge De Tijd révèle que Cowboy fait face à une multiplication de plaintes clients. Certains attendent leur vélo électrique depuis plus de neuf mois, d’autres peinent à obtenir un remboursement ou une réponse claire du service après-vente. Une situation d’autant plus problématique que la marque tente toujours de convaincre les revendeurs d’adopter son nouveau modèle hybride de distribution… en vain. Plusieurs partenaires abandonnent, dénonçant une collaboration jugée “ingérable”.
Parmi eux, Philippe Van Eekhout, figure respectée du marché belge, ne mâche pas ses mots : « J’ai quitté le projet. Je n’ai jamais vu ça. On ne savait jamais quand les vélos allaient être livrés — et quand ils arrivaient, ce n’étaient pas les bons. »
La situation s’est aggravée en mai avec le lancement d’un rappel volontaire pour une série de vélos Cowboy 4 ST présentant un défaut structurel au niveau du cadre. Selon l’enquête, le défaut toucherait potentiellement plusieurs centaines de modèles, en particulier dans les flottes de leasing. Le coût de remplacement est estimé à plus de 1 000 € par vélo.
Cleanrider avait détaillé ce rappel dans son article publié début mai, soulignant que la marque avait demandé aux utilisateurs concernés de cesser immédiatement d’utiliser leur vélo, avec échange gratuit du cadre et nouvelle garantie de deux ans.
Entre 2017 et 2023, Cowboy a accumulé près de 100 millions d’euros de pertes nettes. Le dernier exercice, clos en 2023, mais publié en retard, affiche un nouveau déficit de 21,7 millions. Le capital est désormais négatif (-22,44 M€), et la société reste lestée par une dette de long terme de 43 millions d’euros, assortie de taux d’intérêt pouvant atteindre 12 %.
Une entrée au capital du fonds Cypress Capital à hauteur de 5 millions d’euros a bien été annoncée en septembre 2024, suivie d’une campagne de financement participatif. Mais la valorisation de la société a fondu : seulement 40 millions d’euros fin 2024, contre 172 millions un an plus tôt.
Cowboy avait promis un retour à l’équilibre dès 2023. « Mais cette année-là, le déficit s’est juste réduit, sans s’inverser », commente un analyste cité par De Tijd. Le modèle repose désormais sur des ventes urgentes et la recherche constante de liquidités, y compris via des précommandes payées d’avance… parfois sans livraison des mois après.
Face à ces difficultés, Cowboy avait modifié son modèle économique en 2023, passant de la vente directe à un réseau de 200 revendeurs. Mais les marges jugées faibles et la poursuite des promotions sur le site officiel ont fragilisé cette nouvelle approche. La grogne monte aussi en interne : le directeur marketing, le chef du service client, le directeur de la communication et même le responsable du programme d’économies ont quitté l’entreprise ces derniers mois. Selon De Tijd, la succession du CEO Adrien Roose serait même envisagée.
Le flagship store de Molenbeek a discrètement fermé ses portes, signe d’un repli stratégique. Les revendeurs historiques comme Fnac ou Vanden Borre (en Belgique) ont, eux aussi, cessé la distribution.
Pour répondre aux critiques logistiques, Cowboy avait décidé fin 2024 de rapatrier l’assemblage de ses vélos en France, dans l’usine Re-Cycles à Romilly-sur-Seine. Une initiative saluée par certains clients, mais qui n’a pas permis de résoudre immédiatement les problèmes de production et de délais, comme le reconnaissait Adrien Roose lui-même dans une interview accordée à Cleanrider en février 2025.
L’usine devait produire jusqu’à 50 000 vélos Cowboy cette année, dont le modèle Cross, fer de lance de la gamme actuelle. Mais les promesses d’un retour à des délais courts n’ont pas encore été tenues. De nombreux clients attendent encore leur vélo commandé en 2024, malgré les promesses de livraison sous 15 jours affichées sur le site.
La marque a également été épinglée pour avoir introduit des “défis” sportifs dans son application mobile, incitant certains cyclistes à adopter une conduite risquée. Une initiative jugée irresponsable par la mairie d’Amsterdam, qui a exigé leur retrait. Cleanrider avait détaillé cette affaire dans cet article publié en juillet 2024.
Sur les réseaux, Cowboy a même désactivé les commentaires sur ses publications Instagram, au moment où les critiques explosaient sur Reddit et Trustpilot. « On se heurte à des bots, à des silences. C’est devenu impossible de contacter quelqu’un chez eux », rapporte un client cité par De Tijd.
Officiellement, Cowboy continue d’affirmer sa volonté de rebondir. Mais les doutes s’installent. Les investisseurs s’impatientent, les clients se détournent, et la pression concurrentielle s’accentue, notamment face à Tenways ou VanMoof, récemment relancé.
Les ambitions de volume sont revues à la baisse : Cowboy devrait vendre autour de 16 000 vélos cette année, très loin des millions annoncés en 2022. Même son service Cowboy Connect, autrefois pensé comme un abonnement récurrent, a été transformé en simple achat unique — une stratégie qui laisse peu de marges de manœuvre financières.
Pour l’instant, la direction reste silencieuse. Seule une courte déclaration du cofondateur Tanguy Goretti à L’Echo évoque des “défis multiples” et une année 2025 qualifiée de “cruciale”. Reste à savoir si Cowboy saura redresser la barre… ou s’il rejoindra la longue liste des belles promesses technologiques rattrapées par la réalité du marché.
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