Pour sa quatrième participation consécutive à la Dutch 1000 à cheval sur les 29 et 30 juin 2024, Jérémie Noirot a poussé le curseur encore un peu plus loin. Disposant en prêt d’une Experia d’Energica, il s’est attaqué à la boucle la plus exigeante : « C’est presque devenu trop facile avec une telle moto électrique ! ».
Dans le monde de l’électrique, Jérémie Noirot est connu comme cofondateur des e-Garages Revolte dont le sièges est installé à Carquefou près de Nantes (44). Sa spécialité est le diagnostic des pannes et la réparation des systèmes. Ayant commencé par l’italienne Quantya construite en suisse sur un cadre Husqvarna, il pratique la moto branchée depuis 2011.
Dessinée sur des petites routes aux Pays-Bas, la Dutch 1000 rassemble 350 motards qui s’engagent à parcourir en moins de 24 heures la boucle qu’ils auront chacun choisie : « Les trois tracés de cette année au départ et retour du village de Stroe totalisaient respectivement 500, 700 et 1 000 km. Avec l’Energica Experia, j’ai retenu la plus longue ».
Peu de motos électriques participent à cet événement très prisé des motards néerlandais : « Il n’y a pas beaucoup d’étrangers dans les inscrits, juste quelques Belges, Allemands et encore moins de Français. Il n’y a jamais plus de quatre ou cinq motos électriques. En 2024, nous n’étions que trois. Les autres ont participé sur Zero SR/S et SR/F ».
Même modeste, la présence des motos électriques a fait évoluer le regard des autres bikers : « En quatre ans, j’ai constaté une réelle ouverture grandissante. Avant, on nous adressait un drôle de regard avec un accueil froid. Maintenant, les électriques sont perçues comme de vraies motos, parce que les participants ont vu qu’elles marchent bien. Les motards viennent à notre rencontre pour nous poser des questions, nous demander ce qu’elles valent ».
D’autant plus que désormais les inscrits branchés s’attaquent à la plus grande boucle : « L’un des deux à Zero avait terminé les 700 km en 2023. Cette année il a parcouru les 1 000 km. C’était très tendu pour lui en raison de la lenteur de recharge de sa machine. Il devait arriver à une borne à un niveau d’énergie très bas et repartir après un long arrêt. Tout était millimétré pour lui. Il avait calculé une marge de moins d’une demi-heure. Il a tout juste réussi, à 5 minutes près ».
Pour sa première participation en 2021, Jérémie Noirot avait aussi utilisé une Zero : « Je l’avais lourdement modifiée, en ajoutant de grosses batteries et des chargeurs. Dès 2022, je suis ensuite passé à la marque Energica : Eva Ribelle, puis sur 2023 Ribelle RS avec le nouveau moteur, et enfin l’Experia ».
En comptant le trajet pour se rendre à Stroe et en revenir, notre interviewé a parcouru environ 2 400 km aux commandes de l’Energica Experia. Et ce dans des conditions difficiles. C’est largement suffisant pour juger cette machine : « C’est le dernière modèle sorti par la marque. L’Experia avait été annoncée fin 2022. Les premiers exemplaires ont été livrés dans le courant de l’année 2023. Elle est très différente des autres Energica que l’on pourrait qualifier de motos extrêmes ».
S’il devait lui coller une étiquette, Jérémie Noirot classerait l’Experia « dans les motos à voyager. Elle n’est pas au niveau des grosses routières, mais un gros gap a été réalisé par rapport au reste de la gamme. Beaucoup plus facile à manier et à gérer, l’Experia pardonne beaucoup. C’est un vrai plaisir de la piloter, utilisable au quotidien. Avec cette Energica, on n’est plus autant couché sur l’avant. On est assis plus droit, ce qui procure un meilleur confort ».
Une appréciation qui se comprend par d’importantes différences de conception : « Avec un autre châssis et une architecture spécifique, l’Experia est vraiment une nouvelle moto par rapport aux Ribelle. Cette machine est plus équilibrée. On a aussi de l’amélioration concernant l’aérodynamisme, avec une meilleure protection du conducteur et une moindre consommation ».
Selon Jérémie Noirot, l’Energica Experia se prête mieux au jeu de la Dutch 1000 : « Les Ribelle sont des roadsters clairement pas adaptés à ce genre de parcours ». Avec de petites retouches çà et là, les centaines de kilomètres sont avalées globalement plus rapidement : « J’estime que le gain sur l’autonomie est de l’ordre de 10 %. On a une batterie qui a gagné un kilowattheure de capacité, une puissance de recharge qui est passée de 23-24 à 24-25 kW en se maintenant plus longtemps au maximum ».
Ce qui a facilité la nouvelle participation à cette épreuve : « Un tel voyage, ça s’organise. Mais les contraintes tombent année après année avec les progrès réalisés sur les motos électriques. C’est la première fois que j’ai trouvé ça si facile. Grâce à l’Experia, je n’ai pas eu besoin de regarder ma montre. Avec les départs échelonnés, je me suis lancé à 6 h 47 le samedi 29 juin, pour une arrivée le lendemain à 5 h 13 ».
En tout, cinq recharges intermédiaires ont été effectuées : « Quatre auraient suffi largement, mais cette année mon rythme a été guidé par les besoins en pauses humaines. Dès que je me sentais fatigué, je m’arrêtais et le plus souvent je branchais. Trois heures de conduite sur les petites routes de la Dutch 1000, c’est déjà très éprouvant ».
Voici les chiffres relevés et transmis par Jérémie Noirot, présentés par tronçons en quatre colonnes : Pourcentage d’énergie dans la batterie au départ ; Pourcentage d’énergie à l’arrivée ; Distance parcourue sur le trajet ; Consommation en pourcentage. La première ligne correspond donc au départ de l’épreuve avec arrivée à la première borne pour recharge intermédiaire. Nous n’avons pas les infos pour le tout dernier trajet.
% au départ | % en arrivant | Distance en km | Conso en % |
100 % | 26 % | 200 | 74 % |
93 % | 21 % | 223 | 72 % |
85 % | 52 % | 114 | 33 % |
90 % | 49 % | 99 | 41 % |
95 % | 18 % | 210 | 77 % |
? | ? | 154 (évaluation) | ? |
A partir de ces chiffres, nous avons calculé les consommations total et moyenne par trajet, sachant que l’Energica Experia embarque une batterie d’une capacité utile de 19,6 kWh pour un total de 22,5 kWh.
Distance en km | Conso en kWh | Conso en kWh/100 km |
200 | 14,5 | 7,3 |
223 | 14,1 | 6,3 |
114 | 6,5 | 5,7 |
99 | 8 | 8,1 |
120 | 15,1 | 7,2 |
154 | ? | ? |
Bien que n’ayant pas les chiffres pour la dernière recharge, nous pouvons tout de même déduire une consommation moyenne de 6,9 kWh/100 km sur les 846 km pour lesquels 58,2 kWh d’électricité ont été consommés. Ce qui nous donne une autonomie moyenne estimée de 284 km après recharge complète. « Et ce, sans rouler en mode Eco », précise Jérémie Noirot. C’est sur le trajet de 114 km que la consommation moyenne a été la plus faible, se traduisant alors potentiellement par une autonomie de plus de 343 km.
Un petit oubli au départ a contraint le motard branché et expérimenté à devoir choisir tout de même les lieux pour ses arrêts : « Je suis parti sans mes badges de recharge. Ce qui a rajouté du piment au challenge. Il m’a fallu choisir les stations que je pouvais déclencher à partir d’applications sur smartphone ».
Ce qui ne l’a pas empêché de porter assistance à des personnes extérieures à la Dutch 1000 : « Vers 2 h 00 du matin, devant un MacDo fermé, cinq jeunes allemands sont arrivés en voiture électrique BYD. Il ne leur restait que 2 % d’énergie dans leur batterie. Aux Pays-Bas, ils rencontraient des problèmes pour la recharge. Habitués dans leur pays à pouvoir payer avec une carte bancaire sur toutes les bornes, ils se sentaient perdus. J’ai déclenché pour eux une recharge avec un arrêt automatique à 80 % ».
Une serviabilité qui n’a pas pour autant pesé sur la réussite de l’épreuve : « Je suis revenu à Stroe avec plus d’une heure et demie de marge. Sans cet épisode avec les jeunes Allemands, je serais arrivé trente minutes plus tôt. Le village de départ et retour a été choisi pour son camping où de nombreux participants ont pu dormir avant de s’élancer. L’organisation était très conviviale, avec vraiment l’esprit motard au-delà de la barrière de la langue ».
À lire aussiEssai Energica Experia : la meilleure des motos électriques ?Vingt-quatre heures sur une moto ou à côté lors des pauses, c’est une véritable épreuve qu’il faut pouvoir gérer : « Le parcours est très exigeant, composé de petites routes. Dans les villages, la chaussée est souvent en brique. Parfois aussi au milieu des bois avec des voies étroites. Vers minuit, il a plu. Sur un tel revêtement, c’est très très glissant. C’est là que ça a été le plus dur pour moi. D’autant plus qu’avec les nuages, tout était plus noir ».
C’est sur cette période que les arrêts ont été rapprochés : « L’Energica Experia recharge presque trop vite. Quand on voit le soleil revenir au loin, ça donne du peps. Sur la fin, c’était quand même vraiment dur. Pas au point de l’année dernière où je m’étais découragé à un moment en me demandant ce que je foutais là en raison du mauvais temps ».
Avec cette moto, un cap a été franchi : « Même si la Dutch 1000 reste une épreuve exigeante, c’est presque devenu trop facile. On peut dire qu’avec l’Experia, la seule limite maintenant sur une moto électrique, c’est l’humain ».
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