Ces constructeurs automobiles qui se mettent au vélo électrique

Eric Dupin · 14 Jan 2024 17:30 ·
Porsche Fazua

De nombreux constructeurs automobiles proposent désormais des vélos électriques portant leur logo, qu’il s’agisse d’un modèle unique ou d’une véritable gamme.

Des constructeurs automobiles qui se mettent à la voiture électrique, il y en a maintenant quelques dizaines. Mais vous ne vous êtes pas trompé de site : nombre d’entre eux se mettent aussi à produire ou co-produire des vélos électriques. Les annonces ont été nombreuses ces dernières années sur le sujet, et quand on fouille un peu, on s’aperçoit que ce mouvement touche de nombreuses marques automobiles. A tel point que presque tous les grands groupes proposent désormais des vélos à assistance électrique, même si seul Jeep réalise un chiffre d’affaires conséquent, et, dans une moindre mesure, Mercedes et Porsche.

De qui parlons-nous exactement ? D’une belle brochette de groupes, et pas les moins prestigieux. Porsche, Mercedes, Skoda et Audi du groupe Volkswagen, BMW, Toyota, General Motors, Ford, Stellantis (Jeep, Peugeot) : ce sont quasiment tous les groupes de constructeurs automobiles qui vendent maintenant des VAE.

Divers degrés d’implication des marques

La marque automobile participe-t-elle à la production du VAE, ou se contente-t-elle d’y apposer son logo ? Il existe différents degrés d’implication. Jeep est comparable à un fabricant principal de vélos électriques, qui vend une large gamme de VAE sur de nombreux marchés mondiaux. Mercedes offre une gamme de modèles de vélos électriques dotés de technologies propriétaires, tandis que d’autres, comme Audi ou Toyota, ne commercialisent qu’un seul modèle comme une sorte d’emblème de leur savoir-faire, sur lequel ils ont généralement concentré tous leurs acquis technologiques issus de l’automobile.

Certains constructeurs automobiles semblent vouloir réellement s’investir dans la production de VAE, comme l’indiquent nos confrères de ebike24. Si Jeep est probablement la marque la plus impliquée, les VAE de Mercedes disposent de magnifiques écrans intégrés et de plusieurs moteurs puissants qui semblent fabriqués ou du moins conçus par Mercedes lui-même, même si l’on peut penser que Brose a joué un rôle ou pourrait même être leur fabricant. Porsche semble également prendre l’affaire au sérieux, ayant racheté le fabricant de moteurs high-tech Fazua, même si ses VAE montent encore un moteur Shimano EP8. En mars 2021, l’entreprise avait lancé deux modèles exclusifs avec le Porsche eBike Sport et le eBike Cross. En revanche, les VAE de Peugeot Cycles – pourtant un acteur historique du secteur – ne portent que le logo, puisque Peugeot Cycles a été racheté en 1992 par le suédois Grimaldi Industri, propriétaire de Bianchi, Puch et d’autres marques réputées de VAE. Cela dit, le groupe Stellantis possède également Jeep. Audi réalise ses vélos électriques par l’intermédiaire du fabricant italien Fantic, et ceux de BMW sont fabriqués par l’italien 3T. Aucun constructeur automobile, sauf peut-être Mercedes, ne produit ses propres moteurs de VAE.

Les forces en présence

  • Jeep propose de nombreux modèles de VAE, allant du trekking au VTT, en passant par le pliant. Le plus puissant est le QUIETKAT, qui peut atteindre 1000 Wh de puissance.
  • Mercedes offre trois modèles de vélos électriques au design élégant, de type gravel. Ils sont équipés d’une transmission à courroie Enviolo et d’un écran LCD intégré au guidon. Le plus performant est le Championship edition, qui dispose d’un double moteur et d’une traction intégrale.
  • BMW propose quant à lui des engins équipés d’un moteur Mahle x20 très léger, qui ne délivre que 23 Nm de couple. Ils sont fabriqués par le fabricant italien 3T. Le modèle Exploro Urban coûte 4999 €.
  • Audi vend un VAE de montagne, fabriqué par le fabricant italien Fantic, avec une batterie de 720 Wh. Il coûte 8900 €.
  • Skoda propose un seul modèle de VAE, avec une batterie de 500 W. Il a un aspect assez simple et ne devrait pas être cher.
  • Porsche annonce des VAE équipés de moteurs Fazua, abandonnant le moteur Shimano EP8 monté jusqu’à présent.
  • Ford a lancé en 2013 le Supercruiser, un VAE fabriqué par le fabricant californien Pedigo. Il semble assez dépassé avec son moteur à moyeu arrière, sa batterie sur le porte-bagages et ses freins à disque mécaniques. Il coûtait 3595 $.
  • Toyota limite son offre à un VAE cargo, fabriqué et vendu uniquement en France par le fabricant français Douze.
  • Hummer propose des VAE fidèles au caractère tout-terrain et à l’image « too much » du Hummer, qui au passage est maintenant aussi une voiture électrique.

Vous aurez constaté de vous-même que d’une façon générale ces vélos proposés par les constructeurs automobiles ne sont pas vraiment donnés, ces derniers semblant vouloir plutôt viser le haut de gamme, peut-être pour élargir leurs marges, puisqu’il s’agit de toute façon de marques premium, en majorité.

Une affaire de synergie… et d’image

Côté image de marque, les constructeurs automobiles peuvent profiter de la visibilité et de la diffusion des spacieux showrooms des concessionnaires automobiles. De plus, les vendeurs de voitures ont ainsi l’opportunité de meubler les heures creuses en attirant un autre type de clientèle. Des visiteurs qui pourraient être ou devenir intéressés par les VAE, et inversement. Une stratégie d’actualité quand on sait que les zones à faible émission s’élargissent dans la plupart des villes, ce qui pourrait faire sens pour des clients lorsqu’ils seront contraints d’abandonner leur voiture dans un parking à l’orée de la ville.

Autre motivation : tester sur le terrain des stratégies de vente dans le domaine de la mobilité durable. Dans une certaine mesure, les problématiques des vélos électriques se rapprochent de celles des voitures électriques, mais à une échelle réduite. Il en va ainsi de l’’autonomie, de la durée de vie et du prix des batteries.

Bien que certaines marques de vélos à assistance électrique soient aujourd’hui assez établies et réputées, la plupart des nouveaux acheteurs les connaissent peu, ou mal. Les vélos électriques portant le logo d’une marque de voiture établie, réputée et même prestigieuse peuvent être assez rassurants. De plus, beaucoup de gens sont prêts à payer beaucoup plus pour des vêtements étiquetés BMW, Jeep, ou autres. Acheter un vélo électrique de sa marque automobile préférée, qui plus est, directement chez le concessionnaire, a certainement quelque chose de rassurant autant que valorisant. A fortiori si le vendeur vous fait un lot, un « bundle » avec une très convaincante remise sur l’ensemble. D’ailleurs, certains incluent même le vélo avec l’achat de la voiture ! C’était le cas notamment de Peugeot, qui proposait il y a quelques années un VAE électrique pliant en combo avec l’achat d’une 5008. L’engin se pliait et se fixait dans le coffre, qui était doté d’un dock de recharge intégré. Une parfaite illustration de l’intermodalité adaptée aux ZFE.

Greenwashing ? Peut-être, mais pas seulement…

Alors, greenwashing, pur marketing, ou vraie volonté d’aller sur des mobilités plus douces ? S’il est certain que les constructeurs automobiles ne vont pas se muer intégralement en fabricants de vélos, ce mouvement semble assez naturel dans un contexte où les consommateurs sont de plus en plus nombreux à se détourner de l’automobile pour aller vers des modes de transport moins polluants. Qu’il s’agisse de greenwashing ou non, cette promotion quelque peu inattendue du vélo – même électrique –  peut se révéler être un outil efficace pour les constructeurs qui souhaitent prendre leur part dans la lutte contre la pollution du trafic urbain et le changement climatique.

Vous rêvez de rouler en Porsche ou en Mercedes ? Achetez un vélo !

Spécialiste en innovation dans le domaine du digital et fan d’automobile et de nouvelles mobilités, Eric est éditorialiste sur Cleanrider où il anime la rubrique Roue Libre.


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